mercredi 20 juin 2007

56- La Révolte d’Abou Yézid, l’Homme à l’Âne (3ème Partie)

Cependant, l’Homme à l’âne, qui avait obtenu quelques succès sur des corps isolés, réunit encore une armée et vint, avec confiance, se présenter devant Kairouan ; il attaqua même le camp d’Ismail qui se trouvait en dehors de la ville. On combattit pendant plusieurs jours avec des alternatives diverses ; enfin le Khalife, ayant reçu des renforts et pris une vigoureuse offensive, repoussa les kharidjites dans le sud.

Abou Yézid envoya alors des corps isolés inquiéter les environs de Kairouan et couper la roule de cette ville à El Mahdia et à Sousse. Le chef de la révolte semblait néanmoins à bout de forces ; Ibrahim crut, pouvoir entrer en pourparlers avec lui et lui offrir de lui rendre ses femmes à condition qu’il s’éloigne pour toujours.

L’homme à l’âne accepta et reçut le pardon pour lui et ses partisans.
Mais c’est en vain que le prince Fatimide avait espéré obtenir la paix en traitant le rebelle avec cette générosité. A peine Abou Yézid fut il rentré en possession de son harem qu’il revint attaquer les Fatimides plongés dans une trompeuse sécurité (août 916). Le Khalife résolut alors d’en finir par la force avec ce lâche ennemi. Ayant réuni un corps nombreux de troupes régulières et d’auxiliaires Kétama et Berbères et de l’est, il se mit à leur tête et vint attaquer les Kharidjites qui, en masses tumultueuses, se préparaient à renouveler leurs agressions. Lorsqu’on fut en présence, Ismaïl disposa sa ligne de bataille en se plaçant au centre avec les troupes régulières et en formant son aile droite avec les contingents de l’Ifriqiya et son aile gauche avec les Kétama. Il attendit dans cet ordre le choc de ses ennemis.

Abou Yézid vint attaquer impétueusement les Berbères de l’aile droite et, les avant mis en déroule, se heurta contre le centre qui l’attendit de pied ferme sans se laisser entamer. Après avoir laissé aux Kharidjites le temps d’épuiser leur ardeur, Ismaïl charge à la tête de sa réserve et force l’ennemi à la retraite. Bientôt les adhérents d’Abou Yézid sont en déroute; ils fuient dans tous les sens en abandonnant leur camp et les vainqueurs en font le plus grand carnage. Dix mille têtes de ces partisans furent, dit-on, envoyées à Kairouan, où elles servirent d’amusement à la lie du peuple.

Ce fut alors qu’Ismaïl traça le plan de la ville de Sabra à un mille au sud-ouest de Kairouan. Cette place, qui devait être la capitale de l’empire Obeidite, reçut le nom de son fondateur : Mansouria (la ville de Mansour). Après sa défaite, Abou Yézid avait en vain essayé de se jeter dans Sbiba. De là, il prit la route de l’ouest et se présenta devant Baghai; cette forteresse, qu’il n’avait pu enlever au début de la campagne, lui ferma de nouveau ses portes et il dut en commencer le siège.
Mais il avait affaire à un ennemi dont les qualités militaires se développaient avec les difficultés de la campagne. Sans lui laisser aucun répit, Ismaïl confia le commandement de Kairouan à l’esclavon Merah, et, se mettant à la tête des troupes, alla établir son camp à Saguïet Mems, où il reçut les contingents des Kétama et ceux des cavaliers nomades du sud et de l’est (octobre 946).

Alors commença cette chasse mémorable qui devait se terminer par la chute de l’agitateur. Ismaïl marcha d’abord sur Baghai. A son approche, Abou Yézid prit la fuite à travers les montagnes, vers l’ouest, en passant par Bellezma (12) et Negaous ; il pensait pouvoir résister dans la place forte de Tobna (13), mais le Khalife arriva sur ses talons et il fallut fuir encore.
Dans cette localité, Djafer ben Hamdoun, gouverneur de Mecila et du Zab, vint apporter des présents à son souverain et lui présenter ses hommages. Il lui amenait aussi un jeune chef de partisans qui se disait le Mehdi et qu’on avait fait prisonnier dans l’Aurès, à la tête d’une bande. Le Khalife ordonna de l’écorcher vif. « Ainsi faisait-il de tous ceux qu’il prenait », dit Ibn-Hammad, ce qui lui valut le surnom de l’écorcheur. D’autres prisonniers eurent les mains et les pieds coupés.

Ismaïl reçut également de Mohammed, fils d’El Kheir ben Khazer, chef des Mag’raoua, un message amical. Ce prince, allié des Omeyades d’Espagne, avait, au profit de l’anarchie, étendu son autorité jusqu’à Tiharet et exerçait sa prépondérance sur tout le Maghreb central. Jusqu’alors il avait soutenu l’Homme à l’âne, mais la cause de l’agitateur devenait par trop mauvaise, et le chef des Mag’raoua se hâtait de l’abandonner avant qu’elle fût tout à fait perdue.

Abou Yézid, ne sachant où trouver un appui, dépêcha son fils Ayoub en Espagne pour tâcher d’obtenir une diversion des Omeyades.
En attendant leur secours, il se jeta dans les montagnes de Salat, sur les confins occidentaux du Hodna. Ce pays était occupé par les Beni Berzal, fraction des Demmer, qui professaient ses doctrines. Grâce à l’appui de ces indigènes, il put atteindre la montagne abrupte de Kiana. Mais le Khalife l’y poursuivit, força les Beni Berzal à la soumission et mit en déroute les adhérents de l’agitateur.

Abou Yézid, qui avait gagné le désert, y resta peu de temps et reparut dans le pays des R’omert, au sud du Hodna. Ismaïl vint l’y relancer, et l’Homme à l’âne chercha en vain à rentrer dans le pâté montagneux de Salat. Rejeté vers le sud, il entraîna à sa poursuite les troupes Fatimides, qui reçurent, des mains des Houara de Redir, Abou Ammar l’aveugle et un autre partisan qu’ils avaient arrêtés. L’armée du Khalife éprouva les plus grandes privations dans cette marche, tant par le fait des intempéries que par le manque de vivres, et elle perdit beaucoup d’hommes et de matériel.

Ismaïl pénétra alors dans le pays des Sanhadja, où il fut reçu par Ziri ben Menad avec les honneurs dus à un suzerain. Pour reconnaître sa fidélité, le Khalife le nomma gouverneur de toute la région, au nom des Fatimides, et lui accorda l’autorisation d’achever la ville d’Achir, dont il avait commencé la construction dans le Djebel el Akhdar, pour en faire sa capitale.

Après être arrivé à Hamza, Ismaïl tomba malade et dut séjourner quelque temps dans le pays des Sanhadja. On avait complètement perdu la trace d’Abou Yézid, lorsque tout à coup on apprit qu’il était venu, à la tête d’un rassemblement de Houara et de Beni Kemlane, mettre le siège devant Mecila. Ismaïl, qui se disposait à pousser jusqu’à Tiharet, se hâta d’accourir au secours d’Ibn Hamdoun (fin janvier 947).

Bientôt Abou Yézid fut délogé de ses positions : ayant été abandonné par ses partisans, las de partager sa mauvaise fortune, il n’eut d’autre ressource que de se jeter encore dans les montagnes de Kiana.

Après s’être ravitaillé à Mecila, Ismaïl, en attendant des renforts, alla bloquer la montagne où s’était réfugié son ennemi. Mais celui-ci recevait des vivres de Bantious et autres oasis du Zab, et ne souffrait nullement du blocus. Les contingents des tribus alliées étant enfin arrivés, l’armée Fatimide attaqua la montagne; le combat fut rude ; mais à force d’énergie, les défilés gardés par les Kharidjites furent tous enlevés et les rebelles se dispersèrent en désordre.
Abou Yézid, entraîné dans la déroute, reçut un coup de lance qui le jeta en bas de son cheval. Ceux, qui le poursuivaient, et en tête desquels étaient, dit-on, Ziri ben Menad, se précipitèrent sur lui pour le prendre vivant ; mais son fils Younès et ses partisans accoururent à son secours, et un nouveau combat acharné s’engagea sur son corps. Les Nekkariens purent enfin emporter leur chef blessé. Un grand nombre de Kharidjites avaient été tués. On décapita tous les cadavres, ce qui valut à cette bataille le nom de journée des têtes.

L’Homme à l’âne avait pu gagner le sommet de la montagne de Kiana et se renfermer dans une citadelle établie sur un piton appelé Tagarboucet (l’arçon). Ismaïl l’y poursuivit, mais le refuge du rebelle était dans une position tellement escarpée qu’il dut renoncer à l’enlever sur le champ. Il planta ses tentes au lieu dit En-Nador (l’observatoire), sur un des contreforts de la montagne, et y commença le Ramadan le vendredi 26 mars 947. Le lendemain, il ordonna l’assaut, mais Abou Yézid, entouré de ses fils s’y défendit avec le courage du désespoir.

En vain les assiégeants s’avancèrent, en traversant des ravins escarpés et en escaladant les roches, jusqu’au pied du dernier escarpement, malgré la grêle de pierres et de projectiles que leur lançaient les assiégés, ils ne purent arriver au sommet, et la nuit les surprit avant qu’ils eussent achevé d’assurer leur victoire. Pendant la nuit, Ibrahim fit incendier les broussailles qui environnaient le fort, afin qu’elles ne pussent favoriser la fuite de son ennemi. Les Houara, dont les habitations avaient été brulées et les bestiaux enlevés, vinrent le soir même faire leur soumission.
Ismaïl avait pu se convaincre, dans ces journées de luttes, qu’il n’avait pas assez de troupes pour réduire son ennemi. Il demanda des soldats réguliers à Kairouan et, en attendant leur arrivée, s’installa à son camp du Nador. « Tant que je n’aurai pas triomphé de mon ennemi, disait-il, mon trône sera où je campe. » Le Khalife passa ainsi de longs mois, pendant lesquels il employa les troupes que le blocus laissait disponibles à pacifier la contrée.
Enfin les renforts arrivés par mer parvinrent au camp du Nador et l’on donna l’assaut. Cette fois, la forteresse fut enlevée. Abou Yézid, ses fils et quelques serviteurs dévoués, s’étaient réfugiés dans une sorte de réduit où ils tenaient encore. On finit par y pénétrer, mais l’agitateur n’y était plus ; il était sorti par un passage secret et fuyait au milieu des roches, porté par trois hommes, car il était couvert de blessures. Peut-être aurait-il échappé encore si ceux qui le portaient ne l’avaient laissé rouler dans un ravin profond, d’où il fut impossible de le retirer.

Les vainqueurs finirent par le trouver à demi-mort. Ils l’apportèrent au Khalife, qui l’accabla de reproches sur son manque de foi et sa conduite envers lui ; néanmoins, comme il le réservait pour son triomphe, il fit soigner ses blessures ; mais, quelques jours après, l’Homme à l’âne rendait le dernier soupir (août 947). Son corps fut écorché et sa peau bourrée de paille pour être rapportée à El-Mahdia. Sa chair et les têtes de ses principaux adhérents ayant été salées, furent expédiées à El-
Mahdia. Du haut de la chaire, on y annonça la victoire du Khalife, et les preuves sanglantes en furent livrées à la populace.

La chute d’Abou Yézid fut le dernier coup porté aux Nekkariens. Ayoub et Fadel, fils de l’homme à l’âne, qui avaient pu échapper, tentèrent de rallier les débris des adhérents de leur père. S’étant associés à un ambitieux de la famille d’Ibn Khazer, nommé Mâbed, ils parvinrent à réunir une armée et allèrent attaquer Tobna et même Biskra. Mais le Khalife ayant envoyé contre eux ses généraux Chafa et Kaïcer, soutenus par les contingents des Sanhadja avec Ziri ben Menad, les agitateurs furent défaits et durent se réfugier dans les profondeurs du désert.

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Ainsi se termina la révolte de l’Homme à l’âne, sous les coups de laquelle l’empire Fatimide avait failli s’écrouler. Abou Yézid, dont on ne saurait trop admirer la ténacité, l’indomptable énergie et même les talents militaires, se laissa, comme beaucoup d’autres, griser par le succès.

Par la seule faute qu’il commit, en ne marchant pas sur El Mahdia après la prise de Kairouan, il perdit à jamais sa cause. Doit-on le regretter ?
Nous n’osons affirmer que son succès aurait été bien avantageux pour l’Afrique.

La question qui pouvait se poser, pourquoi les Zénètes l’ont-ils suivi dans son œuvre ? Étaient-ils convaincus de son dogme ou voulaient-ils se débarrasser des Fatimides qui sont d’origine arabe?.

Pourquoi les Kétama et les Sanhadja se sont-ils associés aux Fatimides alors qu’ils étaient au bout du souffle ? Etaient-ils réellement des tribus d’origine arabes comme l’a souligné Ibn Khaldoun ou étaient-ils des berbères qui avaient eu peur de la domination des Zénètes ?.

(11) Délégation du gouvernorat du Kairouan
(12) Chaine montagneuse de la wilaya de Batna l’algérienne
(13) D’après El Bekri, Tobna, ville algérienne était plus grande que Kairouan même. Ancienne Tubunae, située à 4 kilomètres au sud de Barika, il ne reste plus sur les lieux que des débris de constructions et d’ustensiles.

Source :

1- Précis de l’histoire de l'Afrique SeptentrionalePar Ernest MERCIER - 1868

2- Ibn-Khaldoun, Berbères, t. II, p. 530-542, t. III, p. 201-213.

3- El- Bekri, Ibn-Hammad, El-Kaïrouani, p. 98 et suivantes. Documentssur l’hérétique Abou-Yézid, par Cherbonneau. Revue africaine, n° 78, et collectiondu Journal asiatique.

mardi 19 juin 2007

55- La Révolte d’Abou Yézid, l’Homme à l’Âne (2ème Partie)

Abou Yézid s’installa dans le camp de Meyssour, et, suivant son plan de campagne, au lieu de profiter de la terreur répandue par sa dernière victoire pour marcher sur El Mahdia, il lança ses guerriers par groupes sur les provinces de l’Ifriqiya. Les farouches sectaires portèrent alors le ravage et la mort dans tout le pays, qu’ils couvrirent de sang et de ruines. Parmi les plus acharnés à commettre ces excès, se distinguèrent les Beni Kemlane. L’autorité d’Abou Yézid s’étendit au loin.
Plusieurs places fortes tombèrent en son pouvoir et notamment Sousse, où les plus épouvantables cruautés furent commises.

Ce fut sans doute vers ce moment qu’Abou Yézid envoya à l’Omeyade An-Nasser, Khalife de Cordoue, une ambassade pour lui offrir son hommage de fidélité. Cette démarche, il est inutile de le dire, fut fort bien accueillie par la cour d’Espagne. La municipalité de Kairouan avait, dit-on, insisté, pour qu’il la fit. Afin de lui plaire, Abou Yézid avait rétabli dans cette ville le culte orthodoxe.

L’Homme à l’âne, sur le point de réussir, agissait déjà en souverain. Enivré par ses succès, il ne tarda pas à rejeter sa robe de mendiant pour se vêtir d’habillements princiers et s’entourer des attributs de la royauté. Il allait au combat monté sur un cheval de race. Ce n’était plus l’homme à l’âne. Pendant ce temps, Al-Kaïm occupait ses troupes à couvrir sa capitale de solides retranchements, car il s’attendait tous les jours à voir paraître l’ennemi sous ses murs. En même temps, il put faire passer un message aux Kétamiens, toujours fidèles, et à leurs voisins les Sanhadja.

Ces derniers accueillirent favorablement sa demande de secours. Leur chef Ziri ben Menad, que des généalogistes complaisants rattachèrent à la filiation du prophète, s’était, ainsi qu’on l’a vu, déclaré l’ami des Fatimides ; la rivalité de sa tribu avec celle des Zenètes Mag’raoua était une raison de plus pour combattre la révolte des Zenètes Kharidjites.
Des contingents fournis par les Kétama et les Sanhadja vinrent harceler les derrières de l’armée nekkarienne, tandis que des forces plus considérables se concentraient à Constantine.

Après être resté pendant 70 jours dans une inaction inexplicable. Abou Yézid vint mettre le siège devant Al Mahdia. Le faubourg de Zouïla tomba en sa possession, à la suite d’une série de combats qui durèrent plusieurs jours, et il s’avança jusqu’à la Meçolla, à une portée de flèche de la ville (janvier 945). Ainsi se trouva réalisée une prédiction attribuée au Mehdi.

Abou Yézid, dans son ardeur, avait failli se faire prendre, il reconnut que la ville ne pouvait être enlevée par un coup de main et, ayant établi un vaste camp retranché ans dessus de Zouïla, au lieu dit Fehas-Terennout, il entreprit le siège régulier d’El Mahdia.
Ce fut alors que les Kétama et Sanhadja, pour opérer une diversion, sortirent de leur camp de Constantine et vinrent attaquer, à revers, l’armée Kharidjite. Mais, Abou Yézid lança contre eux les Ourfeddjouma (8), sous la conduite de Zeggou el Mezati, et ces troupes parvinrent à les repousser. Ainsi, Al-Kaïm demeura abandonné à lui-même, n’ayant d’autre espoir de salut que dans son courage et sa ténacité.
Abou Yézid pressa le siège, livrant de nombreux assauts à la ville ; les Fatimides, de leur côté, firent de continuelles sorties. L’issue de ces engagements était généralement indécise, car les assiégeants, en raison de la configuration du terrain, ne pouvaient mettre en ligne toutes leurs forces et perdaient l’avantage du nombre. L’Homme à l’âne se multipliait, conduisant lui-même ses guerriers au combat et il faillit trouver la mort dans une de ces luttes, ou l’acharnement était égal de part et d’autre.

Il fallut dès lors renoncer à enlever la place de vive force et se contenter de maintenir un blocus rigoureux. Pour employer une partie de ses troupes et se procurer des approvisionnements, Abou Yézid les envoyait fourrager dans l’intérieur. Bientôt la famine vint ajouter à la détresse des assiégés, entassés dans El Mahdia, et Al-Kaïm dut se décider à expulser les non-combattants qui étaient venus s’y réfugier lors de l’approche des Kharidjites.
Ces malheureux, femmes, vieillards et enfants furent impitoyablement massacrés par les Nekkariens, qui leur ouvraient le ventre pour chercher, dans leurs entrailles; les bijoux et monnaies qu’ils supposaient avoir été avalés par les fuyards.
Abou Yézid donnait lui-même l’exemple de la cruauté : tout prisonnier était torturé. Les Obeidites, de leur côté, ne faisaient aucun quartier.
Le siège traînait en longueur ; les Fatimides avaient trouvé de nouvelles ressources, soit dans les magasins d’approvisionnement, soit par suite d’un ravitaillement exécuté par Ziri ben Menad, selon Ibn- Khaldoun (ce qui semble peu probable, à moins qu’il n’ait été opéré par mer).

Dans les premiers jours, des rassemblements considérables de Berbères arrivant du Djebel Nefoussa (9), du Zab, ou même du Maghreb, venaient sans cesse grossir l’armée des Nekkariens. Mais cette armée, par sa composition hétérogène, ne pouvait subsister qu’à la condition d’agir et surtout de piller. L’inaction, les privations ne pouvaient convenir à ces montagnards accourus à la curée. L’Homme à l’âne essayait de les lancer sur les contrées de l’intérieur ; mais à une grande distance, il ne restait plus rien ; tout avait été pillé. Les guerriers nekkariens commencèrent à murmurer ; bientôt des bandes entières reprirent le chemin de leur pays et, une fois cette impulsion donnée, l’immense rassemblement ne tarda pas à se fondre.

Promptement, Abou Yézid n’eut plus autour de lui que les contingents des Houara de l’Aurès (10) et des Beni Kemlane et quelques Beni Ifrene. El-Kaïm profita de l’affaiblissement de son ennemi pour effectuer une sortie énergique qui rejeta l’assiégeant dans son camp.
En même temps, des émissaires habiles suscitèrent le mécontentement parmi les derniers adhérents d’Abou Yézid, en faisant ressortir combien son luxe et sa conduite déréglée étaient indignes de son caractère.

Incapable de résister à une nouvelle sortie et ne pouvant même plus compter sur ses derniers soldats, Abou Yézid se vit forcé de lever le siège au plus vite et d’opérer sa retraite sur Kairouan, en abandonnant son camp aux assiégés. Selon Al-Kaïrouani, trente hommes seulement l’accompagnaient dans sa fuite (août 945).

El Mahdia se trouva ainsi délivrée au moment ou les rigueurs du blocus l’avaient réduite à la dernière extrémité. Depuis longtemps, les vivres étaient épuisées ; on avait dû manger la chair des animaux domestiques et même celle des cadavres. Les assiégés trouvèrent dans le camp Kharidjite des vivres en abondance et des approvisionnements de toute sorte. Aussitôt, le Khalife Al-Kaïm reprit l’offensive.
Tunis, Sousse et autres places rentrèrent en sa possession, car la retraite des nekkariens avait été le signal d’un tollé général de la part des populations victimes de leurs excès.

Quant à Abou Yézid, il avait été reçu avec le dernier mépris par les habitants de Kairouan, lorsqu’ils avaient vu sa faiblesse. L’Homme à l’âne, en éprouvant la rigueur de la mauvaise fortune, changea complètement de genre de vie, il revint à la simplicité des premiers jours et reprit la chemise de laine et le bâton, simple livrée sous laquelle il avait obtenu tous ses succès. En même temps, des officiers dévoués lui amenèrent des troupes fidèles qui occupaient différents postes. Il se mit à leur tête et porta le ravage et la désolation dans les campagnes environnantes.

Sur ces entrefaites, Ali ben Hamdoun, gouverneur de Mecila, ayant réuni un corps de troupe, opéra sa jonction avec les contingents des Kétama et Sanhadja et s’avança à marches forcées au secours des Fatimides.
Les garnisons de Constantine et de Sicca Veneria (le Kef) se joignirent à eux. Mais Ayoub, fils d’Abou Yézid, suivait depuis Béja tous leurs mouvements, et, une nuit, il attaqua à l’improviste Ibn Hamdoun dans son camp. Les confédérés, surpris avant d’avoir pu se mettre en état de défense, se trouvèrent bientôt en déroute et les Nekkariens en firent un grand carnage. Ali ben Hamdoun, lui-même, tomba, en fuyant, dans un précipice où il trouva la mort. Les débris de l’armée, sans penser à se rallier, rentrèrent dans leur cantonnement.

Tunis était tombée, quelques jours auparavant, au pouvoir de Hassen ben Ali, général d’Al-Kaïm, qui avait fait un grand massacre des Kharidjites et de leurs partisans.
Aussitôt après sa victoire, Ayoub se porta sur Tunis, mais le gouverneur Hassen étant sorti à sa rencontre, plusieurs engagements eurent lieu avec des chances diverses. Ayoub finit cependant par écraser les forces de son ennemi et le couper de Tunis, où les Nekkariens entrèrent de nouveau en vainqueurs. Hassen, qui s’était réfugié sous la protection de Constantine, toujours fidèle, entreprit de là plusieurs expéditions contre tes tribus de l’Aurès.

Encouragé par ce regain de succès, Abou Yézid voulut tenter un grand coup. Dans le mois de janvier 946, il alla, à la tête d’un rassemblement considérable, attaquer Sousse, et, pendant plusieurs mois, pressa cette place avec un acharnement qui n’eut d’égal que la résistance des assiégés.

Sur ces entrefaites, un dimanche, le 18 mai 946, le Khalife Aboul Kacem el
Kaïm cessa de vivre à El Mahdia. Il était figé de 55 ans. Avant sa mort, il désigna comme successeur son fils Abou Tahar Ismaïl qui devait plus tard recevoir le surnom d’Al-Mansour (le victorieux). Selon Al-Kaïrouani, Al-Kaïm aurait, un mois avant sa mort, abdiqué en faveur de son fils.

Ismaïl, le nouveau Khalife fatimide, était âgé de 32 ans. C’était un homme courageux, instruit et distingué. Il s’élevait, dit Ibn-Hammad, au-dessus de tous les princes de la famille Obeidite par la bravoure, le savoir et l’éloquence. Dans les circonstances où il prenait le pouvoir, il lui fallait autant de prudence que de décision ; aussi, pour éviter de fournir un nouveau sujet de perturbation, commença-t-il par tenir secrète la mort de son père. Rien, à l’extérieur, ne laissa supposer le changement de règne.

Sousse était, alors réduite à la dernière extrémité. Le premier acte d’Ismail fut d’envoyer une flotte porter des provisions et un puissant renfort aux assiégés. Les généraux Rachik et Yakoub ben Ishak, qui commandaient cette expédition, abordèrent heureusement et, secondés par les troupes de la garnison, vinrent avec impétuosité attaquer le camp des Nekkariens, au moment où ceux-ci se croyaient sûrs de la victoire.
Après une courte lutte, les Kharidjites furent mis en déroute et leur camp demeura aux mains des Fatimides. Sousse était sauvée.

Abou Yézid chercha un refuge à Kairouan, où se trouvaient ses femmes et le fidèle Abou Ammar. Mais les habitants de la ville, indisposés contre lui à cause de ses cruautés, et voyant son étoile sur le point d’être éclipsée, fermèrent les portes à son approche et refusèrent de le recevoir. Il se retira à Sbiba, suivi seulement de quelques partisans. En même temps, le Khalife Ismaïl, après avoir passé par Sousa, faisait son entrée à Kairouan (fin mai 946). Il accorda une amnistie générale aux habitants de cette ville. Les femmes et les enfants d’Abou Yézid furent respectés, et le prince fit pourvoir à leurs besoins.

La suite : 56- La Révolte d’Abou Yézid, l’Homme à l’Âne (3ème Partie)

(8) Tribu du sud Tunisien
(9) le Djebel Nefoussa s'étend du sud de la Tunisie à l'est de la Libye Certains descendants des kharijites s’y trouvent encore aujourd’hui.
(10) La tribu berbère des Houara occupait jadis presque toutes les plaines qui s'étendent de Tébessa à constantine. Les Henencha, Harkata et Nememcha ne sont autres que leurs descendants.

lundi 18 juin 2007

54- La Révolte d’Abou Yézid, l’Homme à l’Âne (1ère Partie)

Abou Yézid, fils de Makhled ben Kidad El Ifréni (أبو يزيد مخلد بن كيداد), Zénète de la tribu des Beni Ifréne, fraction des Ouargou, avait été élevé à Takious(1), dans le pays de Kastiliya(2).
Il était né, dit-on, à Nefzaoua (selon certaines autres sources au Soudan, du commerce de son père avec une négresse, dans un voyage effectué par Makhled pour ses affaires). Il avait fait ses études à Takious et à Tozeur, où il avait reçu les leçons du Mokaddem (évêque) des Ibâdites Abou-Ammar, l’aveugle. Il s’était ainsi pénétré, dès son jeune âge, des principes de ces sectaires et particulièrement de la fraction qui était désignée sous le nom de Nekkariens(3). C’étaient des puritains militants qui permettaient le meurtre, le viol et la spoliation sur tous ceux qui n’appartenaient pas à leur secte.
Abou Yézid était contrefait, boiteux de naissance et fort laid, mais, dans cette enveloppe frêle et disgracieuse, brûlait une âme ardente et d’une énergie invincible. Il possédait à un haut degré l’éloquence qui entraîne les masses.

Dès qu’il eut atteint l’âge d’homme, il s’adonna à l’enseignement, c’est-à-dire qu’il s’appliqua à répandre les doctrines de sa secte, et ses prédications enflammées n’avaient qu’un but : pousser à la révolte contre l’autorité constituée. Il parcourut les tribus Kharidjites en pratiquant le métier d’apôtre, et se trouvait à Tiharet au moment du triomphe du Mehdi. Il se posa, dès lors, en adversaire résolu de la Dynastie Fatimide.

Forcé de fuir de Tiharet, il rentra dans le pays de Kastiliya et ne tarda pas à se faire mettre hors la loi par les magistrats de cette province. Il tenta alors d’effectuer le pèlerinage, mais il ne paraît pas qu’il eût réalisé ce projet, qui n’était peut-être qu’une ruse de sa part pour détourner l’attention.

Vers 928, il était de retour à Takious et, dès l’année suivante, commençait grouper autour de lui des partisans prêts à le soutenir dans la lutte ouverte qu’il allait entamer.
En 934, il se crut assez fort pour lever l’étendard de la révolte à Takious, mais le souverain Fatimide s’étant décidé à agir sérieusement contre lui, Abou Yézid dut encore prendre la fuite. Il renouvela sa tactique et simula ou effectua un voyage en Orient.

Après quelques années de silence, il rentrait à la faveur d’un déguisement à Tozeur (938) mais avant été reconnu, il fut arrêté par le gouverneur et jeté en prison. A cette nouvelle, son ancien précepteur Abou-Ammar, l’aveugle, mokaddem des Nekkariens, cédant aux instances de deux des fils d’Abou Yézid, nommés Fadhel et Yézid, réunit un groupe de ses adeptes et alla délivrer le prisonnier.

Cette fois, il n’y avait plus à tergiverser et il ne restait à Abou Yézid qu’à combattre ouvertement. Il se réfugia dans le sud chez les Beni Zendak, tribu Zénète, et, de là, essaya d’agir sur les populations Zénètes de l’Aurès et du Zab et notamment sur les Beni Berzal.

Il avait soixante ans, mais son ardeur n’était nullement diminuée, malgré l’âge et les infirmités. Après plusieurs années d’efforts persévérants, il parvint à décider ces populations à la lutte. Vers 912, il réunit ses principaux adhérents dans l’Aurès, se fit proclamer par eux cheikh des vrais croyants, leur fit jurer haine à mort aux Fatimides et les invita à reconnaître la suprématie des Omeyades d’Espagne. Il leur promit en outre qu’après la victoire, le peuple berbère serait administré, sous la forme républicaine, par un conseil de douze cheiks. L’homicide et la spoliation étaient déclarés licites à l’encontre des prétendus orthodoxes, dont les familles devaient être réduites en esclavage.

En 942, Abou Yézid profita de l’absence du gouverneur de Baghaï (4) pour venir, à la tête de ses partisans, ravager les environs de cette place forte.
Une nouvelle course dans la même direction fut moins heureuse, car le gouverneur, qui, cette fois, était sur ses gardes, repoussa les Nekkariens et les poursuivit dans la montagne; mais, s’étant engagé dans des défilés escarpés, il se vit entouré de Kharidjites et forcé de chercher un refuge derrière les remparts de sa citadelle.

Abou Yézid essaya en vain de le réduire ; manquant de moyens pour faire, avec succès, le siège de Baghai, il changea de tactique. Des ordres, expédiés par lui aux Beni Ouacin, ses serviteurs spirituels, établis dans la partie méridionale du pays de Kastiliya, leur prescrivirent d’entreprendre le siège de Tozeur et des principales villes du Djérid. Cette feinte réussit à merveille, et, tandis que toutes les troupes des postes du sud se portaient vers les points menacés, Abou Yézid venait s’emparer sans coup férir de Tébessa et de Medjana. La place de Mermadjenna éprouva bientôt le même sort ; dans cette localité, le chef de la révolte reçut en présent un âne gris dont il fit sa monture. C’est pourquoi on le désigna ensuite sous le sobriquet de l’homme à l’âne.

De là, Abou Yézid se porta sur El-Orbos (5), et, après avoir mis en déroute le corps de troupes Kétamiennes qui protégeait cette place, il s’en empara et la livra au pillage : toute la population réfugiée dans la grande mosquée fut massacrée par ses troupes, qui se livrèrent aux plus grands excès. Ainsi, un succès inespéré couronnait les efforts de l’apôtre.

L’homme à l’âne prit alors le titre de Cheikh des Croyants : vêtu de la grossière chemise de laine à manches courtes usitée dans le sud, il affectait une grande humilité, n’avait comme arme qu’un bâton et comme monture qu’un âne.
En présence du danger qui le menaçait, le Calife Fatimide Al-Kaïm bi Amr Allah, sans s’émouvoir, réunit des troupes et les envoya renforcer les garnisons des places fortes.
Avec le reste de ses soldats, il forma trois corps dont il donna le commandement en chef à Meyssour. L’esclavon Bochra partit à la tête d’une de ces divisions pour couvrir Béja, menacée par les Nekkariens. Le général Khalil ben Ishak alla occuper Kairouan et Rakada (6), avec le second corps. Enfin Meyssour demeura avec le dernier è la garde d’El-Mehdia.

Abou Yézid marcha directement sur Béja et fi t attaquer de front l’armée de Bochra par un de ses lieutenants nommé Ayoub. Celui-ci n’ayant pu soutenir le choc des troupes régulières, l’Homme à l’âne effectua en personne un mouvement tournant qui livra aux Kharidjites le camp ennemi et changea la défaite en victoire. La ville de Béja fut mise à feu et à sang par les vainqueurs. Les hommes, les enfants mêmes furent passés au fil de l’épée, les femmes réduites en esclavage. Cette nouvelle
victoire eut le plus grand retentissement dans le pays et, de partout, accoururent, sous la bannière d’Abou Yézid, de nouveaux adhérents, autant pour échapper à ses coups que dans l’espoir de participer au butin.

Les Beni Ifrene et autres tribus Zénètes formaient l’élite de son armée. L’Homme à l’âne s’efforça de donner une organisation è ces hordes indisciplinées qui reçurent des officiers, des étendards, du matériel et des tentes ; quant à lui, il conserva encore la simplicité de son accoutrement.

De Tunis, où il s’était réfugié, Bochra envoya contre les Nekkariens de nouvelles troupes, mais elles essuyèrent encore une défaite à la suite de laquelle ce général, contraint d’évacuer Tunis, alla se réfugier à Sousse.
L’Homme à l’âne, après avoir fait une entrée triomphale à Tunis, alla établir son camp sur les bords de la Medjerda, pour y attendre de nouveaux renforts, afin d’attaquer le souverain Fatimide au cœur de sa puissance. Les populations restées fidèles à cette dynastie se réfugièrent sous les murs de Kairouan. Le moment décisif approchait.

En attendant qu’il pût investir El Mahdia, Abou Yézid, pour tenir ses troupes en haleine, les envoya par petits corps faire des incursions sur les territoires non soumis. Ces partis répandirent la dévastation dans les contrées environnantes et rapportèrent un butin considérable.

Enfin l’Homme à l’âne donna le signal de la marche sur la capitale. En avant de Sousse, l’avant-garde, commandée par Ayoub, se heurta contre Bochra et ses guerriers brûlant de prendre une revanche. Les Kharidjites furent entièrement défaits : quatre mille d’entre eux restèrent sur le champ de bataille et un grand nombre de prisonniers furent conduits à El Mahdia, où le prince ordonna leur supplice.

Cet échec, tout sensible qu’il fût, n’était pas suffisant pour arrêter l’ardeur des Nekkariens avides de pillage. Bientôt, en effet, renforcés de nouveaux volontaires, ils reprirent leur marche vers le sud et arrivèrent sous les murs de Rakada. A leur approche, les troupes abandonnèrent cette place et allèrent se renfermer dans Kairouan. Après être entré sans coup férir dans Rakada, Abou Yézid se porta sur Kairouan, qu’il investit avec les cent mille hommes dont il était suivi.

Khalil ben Ishak, qui n’avait rien fait pour empêcher l’investissement de la ville dont il avait le commandement, ne sut pas mieux la défendre pendant le siège. Dans l’espoir de sauver sa vie, il entra en pourparlers avec Abou Yézid et poussa l’imprudence jusqu’à venir à son camp. L’homme à l’âne le jeta dans les fers et bientôt le fit mettre à mort, malgré les représentations que lui adressa Abou Ammar contre cet acte de lâcheté. Pressée de toutes parts et privée de chef, la ville ne tarda pas à ouvrir ses portes aux assiégeants (milieu d’octobre 944).

Suivant leur habitude, les Kharidjites livrèrent Kairouan au pillage ; les principaux citoyens, les savants, les légistes étant venus implorer la clémence du vainqueur, n’obtinrent que d’humiliants refus; ils auraient même, selon Ibn Khaldoun, reçu l’ordre de se joindre aux Kharidjites et de les aider à massacrer les habitants de la ville et les troupes Fatimides.

On dit qu’en faisant son entrée dans la ville, Abou Yézid criait au peuple: « Vous hésitez à combattre les Obeidites (7) ? Voyez cependant mon maître Abou Ammar et moi ; l’un est aveugle, l’autre boiteux : Dieu nous a donc, l’un et l’autre, dispensés de verser notre sang dans les combats, mais nous ne nous en dispensons pas ! ».

Dans toute cette première partie de la campagne, les généraux fatimides semblent avoir lutté d’incapacité, en se laissant successivement écraser sans se prêter aucun appui. Après la chute de Kairouan, Meyssour, sortant de son inaction, vint, à la tête d’une nombreuse armée, attaquer le camp des Kharidjites. La bataille eût lieu au col d’El-Akouïne, en avant de la ville sainte, et elle parut, d’abord, devoir être favorable aux Fatimides, lorsque le contingent de la tribu Houaride des Beni Kemlane de l’Aurès, transportée quelques années auparavant dans l’Ifriqiya, passa dans les rangs Kharidjites et, se retournant contre les troupes Fatimides, y jeta le désordre, suivi bientôt de la défaite. Meyssour reçut la mort de la main des Beni Kemlane qui portèrent sa tête au chef de la révolte. Les tentes et les étendards obeidites tombèrent aux mains des Nekkariens. La tête de Meyssour, après avoir été traînée dans les rues de Kairouan, fut envoyée en Maghreb avec la nouvelle de la victoire.

La Suite : 55- La Révolte d’Abou Yézid, l’Homme à l’Âne (2ème Partie)

Remarques personnelles :
(1) Takious ou Taguïous est située à environ 10 km de Tozeur du côté de Ouled Majed du côté de l’est, il ne reste plus d’elle que quelques vestiges épars dans les Oasis et au flanc de la montagne. Elle se situe juste à côté de Deguech
(2) Kastiliya : Actuel Djérid
(3) Nekkariens : « النكار « c’est une secte à part auquelle il faudrait peut être réservé toute une note. Se sont un groupe d’Ibadites constitué de Abdallah Ibn Abdelaziz, Abou Maarouf Choayb, Abou Moarrekh Amrou ben Mohamed, Hatem ben Mansour et Abdallah ben Zid El Fazari qui se sont séparés de leur maitre Abou Oubayda Moslem Ibn Abi Karima en raison de leurs divergences théologiques.
Ils ont commencé leur aventure comme étant un groupe politique d’opposition aux Ibadites. Le côté spirituel de cette secte s’était développé au sein de ses dissidents à la Bassora.
(4) Ville historique située en Algérie dans la Wilaya de Kenchela
(5) El-Orbos connue aussi sous le nom de Laribus située juste à côté de la ville de Dahmani en Tunisie
(6) Ville située à côté de Kairouan
(7) Les Fatimmides sont appelés aussi Obeidites par référence au fondateur de cette dynastie Obeyd Allah Al Mahdi.

Source :
1- Précis de l’histoire de l'Afrique Septentrionale
Par Ernest MERCIER - 1868
2- Ibn-Khaldoun, Berbères, t. II, p. 530-542, t. III, p. 201-213.
3- El- Bekri, Ibn-Hammad, El-Kaïrouani, p. 98 et suivantes. Documents
sur l’hérétique Abou-Yézid, par Cherbonneau. Revue africaine, n° 78, et collection
du Journal asiatique.