mardi 20 novembre 2007

72- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (6ème Partie)

Ces deux messieurs, Ali Ben Khlifa et Ali Chérif n'ont pu être fusillés; ils sont à 40 kilomètres de Sfax où ils consultent évidemment les Arabes de la plaine. Ali-Chérif est un ancien artilleur du Bey ; on disait à Tunis qu'il avait été à l'Ecole Polytechnique, alors qu’il n'était qu'un modeste artilleur arabe ignorant, mais très chatouilleux de l'indépendance des Tunisiens.

A Sfax, il était commandant de place et, comme tel, préposé à la manœuvre des vieux canons, quand le gouverneur lui signifia la traité du Bardo. Il refusa d'abord d'y croire, puis il organisa la révolte méthodiquement et patiemment.
La ville de Sfax a d'autant mieux mérité son châtiment exemplaire qu'elle a bien étudié son affaire avant de s'y lancer.

Il a été a trouvé plusieurs fusils Martini déchargés dans les rues, et un fusil Gras et même un capitaine du 93ème fouillant une maison tomba sur un Turque qu’il mit au mur et fusilla.

Le nombre élevé de tués et le manque de purifiants fait craindre que le séjour des cadavres sous une couche de terre trop légère n'apporte aux troupes des émanations dangereuses.

Le soldat n'a que le strict biscuit pour se sustenter jusqu'à présent, un peu de viande de temps en temps, et les adoucissements que les "mercanti" accourus en troupes serrées vendent horriblement cher.

Le malin serait le Parisien qui partirait aujourd'hui ou dans huit jours de Marseille, avec un navire chargé de conserves, de vin, de cognac, de saucisson, de harengs, de café et d'appareils à fabriquer la glace : il ferait fortune en quinze jours au détriment de tous les mercantis sans sou ni maille, qui ne vendent que d'horribles drogues et des viandes pourries.

Deux jours après la prise de Sfax, le cuirassé l'Alma compte toujours à son bord une centaine de réfugiés, hommes, femmes et enfants, qui redescendront à terre le 3ème jour.
Les femmes étaient couchées d'un côté avec les enfants, les hommes de l'autre et, pendant quelques jours, avant l'arrivée du gros de l'escadre, ils ont un peu vécu de pain et d'eau claire.
Maintenant le spectacle était curieux et triste à voir. Les souffrances sont oubliées de tous, et chacun va essayer de se remettre au travail. Cependant, la sécurité n'eut pas grande, il faut que les six bataillons qui sont à Sfax restent à Sfax, et opèrent des mouvements en rase campagne, à dix kilomètres autour de Sfax.

Ces hommes, aujourd'hui complétés au nombre de trois mille environ, sont trop précieux pour qu'on les envoie à Gabès. Si l'escadre va à Gabès, comme cela est dicté par les nécessités d'une répression exemplaire, l'amiral Garnault aura bien assez de ses douze cents marins des compagnies de débarquement, protégés, jusqu'à l'arrivée de troupes fraîches, tirées de France, par les canonnières des escadres.

Telle a été la prise de Sfax. Les Arabes sont vraiment naïfs! Ils n'ont jamais voulu croire, dans l’intérieur, à la prise de Sfax. Dans Kairouan même, ville sainte, où est enterré le barbier du Prophète, les marabouts la nient, se basant sur ceci qu'un projectile ne peut porter à plus de deux mille mètres, et que la rade de Sfax est inabordable pour nos gros cuirassés.

Certains auteurs n’hésitent pas à évoquer que la prise de Sfax a été un souvenir dramatique gravé dans les Bibelots du Pillage dont la population Sfaxienne a été victime.

L'historien Français "Martel" a écrit : "Les valeureux chevaliers du Cheikh se sont opposés avec bravoure a l'armée française qui était bien plus supérieure avec ses canons et ses armes l'obligeant a se cacher dans les casernas et les Bateaux de guerres 15 jours de suite.....et sans la fin des munitions et des renforts Français, Sfax et ses environs auraient pu être une grande tombe pour les soldats Français"Apres la Bataille de Sfax, Le Vieux Ali Ben Khalifa s’est trouvé gravement blessé a la Jambe et comme même, il est reparti défendre Gabès.
Le courage est insuffisant contre la technologie et la force des Canons, Ben Khalifa perdra encore cette bataille mais continuera sa révolte à partir de la Tripolitaine et infligera beaucoup de dégâts à l’armée française mais surtout il ancrera le sang de la révolte dans les générations qui viennent après.





Ben Khalifa - Ali Ben Khalifa - Ali Ben Khalifa -

lundi 19 novembre 2007

71- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (5ème Partie)

Plus tard, sous un vieux porche, eu lieu le conseil des notables, présidé par un lieutenant-colonel, entouré de trente officiers. Les notables ont obtenu l'Aman et ont traité sur l'Alma avec Djellouli, le Gouverneur Beylical, qu'ils avaient expulsé. Il a été entendu qu'ayant toute discussion, ils s'en iraient aux quatre coins de la ville, par deux ou trois, criant à leurs coreligionnaires qu'il y avait trêve et qu'ils pouvaient sortir des caves sans danger pour leur vie.

Il faut dire qu'un avis semblable, lu par des interprètes, n'avait produit aucun effet. Les officiers donnent à chaque notable une garde de quatre hommes, et voilà nos gens partis, criant en arabe et invitant leurs compatriotes à sortir de terre.
Aussitôt, par dix et par quinze, les Arabes se dénichent. Plus d'un jeune troupier demeure stupéfait, et songe au nombre incalculable de coups de fusil qui pouvaient encore sortir des caves.

Tout ce monde avait passé quatre jours sans manger ni boire, ce qui n'est pas excessif pour un Arabe qui fait la guerre sainte. Mais ils ne s'en jetaient pas moins avec avidité sur les tasses d'eau que les soldats leur apportaient.
Ces soldats sont ainsi faits : après avoir fusillé avec rage pendant la lutte, ils s'empressent autour des blessés qui sortent de leurs repaires sur la foi des traités.

Il est probable que le général Logerot viendra, à Sfax prochainement, pour se rendre compte de la situation et décider certaines mesures d'occupation.
Les troupes vont occuper la ligne d'enceinte de la ville, vont faire éclater les canons dont les insurgés se servaient, raser les murailles, trop élevées, et attendre que les Sfaxiens viennent relever leurs maisons, si tel est leur bon plaisir.

D'indemnités, il n'on sera accordé qu'à la condition de les prendre sur les Arabes ; aussi la contribution de guerre qui sera imposée sera-t-elle probablement considérable. Avec l'argent, ou compensera les pertes que le bombardement et les autres faits de guerre auront fait subir aux Européens.
(plus tard, la ville de Sfax, a été imposée pour dix millions de piastres soit environ six millions de franc !!!)

Un seul navire de guerre étranger assistait à la prise de Sfax, le "Monarch", frégate anglaise. Le commandant a été correct, en apparence. Sur l'invitation habile de son gouvernement, il a proposé tout d'abord son concours belliqueux qui fut décliné.

Plus tard, le commandant du Monarch envoya, pendant l'action des escadres, douze barriques d'eau fraîche aux soldats français, ses médecins et ses ambulanciers avec le pavillon blanc à croix rouge de la convention de Genève. II félicita, après l'action, les officiers français de son grade.

En l’espace de quelques jours, la population. Musulmane commence à revenir; elle se méfie toujours un peu, mais cela passera. Les Arabes insurgés sont toujours réfugiés dans les jardins de Sfax qui ont six lieues d'étendue. II faudrait une armée pour les traquer, mais il est probable que le terrible châtiment que les Sfaxiens ont subi pacifiera cette contrée.

On se figure sans doute en France que Sfax est une petite ville, un bourg fortifié, quelque village arabe perdu sur la côte sud de la Tunisie.
Or il faut savoir que Sfax était, après Tunis, la ville la plus importante de toute la Régence. Rivalisant avec Tripoli pour le commerce des huiles, des alfas, des plumes d'autruche, des fruits et des froments, Sfax venait avant Sousse, avant Monastir et avant Mahdia, ces trois ports d'exportation de la Tunisie, aussi inconnus des Parisiens qu'ils sont fréquentés des trafiquants méditerranéens, Grecs, Maltais, Algériens et autres.

Quinze mille habitants aisés demeuraient à Sfax. Après l’acte de guerre, ils commencent à revenir. Le colonel Jamais les a autorisés à rentrer en ville, mais à la condition d'être accompagnés de leurs femmes et de leurs enfants : les célibataires sont soigneusement écartés; un conseil d'examen préside à ce triage et siège en permanence à la place.

Au lendemain de la prise de Sfax, il y a eu un petit marché aux portes de la ville. On y a vendu aux troupes et à l'escadre du raisin et des volailles ; c'est le commencement de la détente. Un ordre du colonel Jamais a prescrit hier la mise en accusation, devant le conseil de guerre, de tout soldat qui soustrairait un objet des maisons aujourd'hui rouvertes.

Le sous-gouverneur a repris ses fonctions, en attendant que Djellouli ose reprendre les siennes. Le vieux gouverneur de la ville est toujours réfugié à bord de l'Alma; il rentrera en ville demain, quand une centaine de familles seront réintégrées. Celles qui sont déjà revenues sont remises en possession de leurs maisons, ou du moins de ce qui reste : elles font en partie le "popotte" avec les troupiers, car il ne leur reste en général pas une fourchette ni une tasse. Tout a sauté en l'air ou s'est fondu dans le feu.

La veille de la prise de Sfax, entre minuit et une heure, il y a eu une alerte : cent cavaliers de la plaine environ sont venus attaquer les chameaux d'un groupe de Sfaxiens, campés à proximité de la ville et prêts à rentrer chez eux au petit jour. Ces Arabes vont sans doute sur Gabès et ont besoin de moyens de transport; ils ont vigoureusement attaqué les Sfaxiens qui, tous armés, se sont défendus. Nos Gardes ont été à leur tour attaquées par les cavaliers que les Sfaxiens avaient repoussés, et des feux de salve bien nourris en ont jeté bon nombre à terre.

Ces alertes nocturnes ne discontinuent pas ; elles entretiennent l'inquiétude du soldat, car, chaque nuit, on entend des coups de fusil autour de la ville. Les troupes françaises ont construit près des remparts arabes des tranchées en terre et des épaulements, en cas de retour offensif d'Ali Ben Khlifa, le grand meneur de toute l'affaire de Sfax, avec Ali Chérif, l'ancien commandant de place.

A Suivre ...

vendredi 16 novembre 2007

70- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (4ème Partie)

A dix heures du soir tout était fini. Notre escadre avait tiré plus de deux mille coups de canon et l'ennemi avait perdu de six à huit cents hommes et il était découragé, surtout à cause de la mort de plusieurs de ses chefs, notamment de Belkassem ben Djerouda qui avait la réputation d'être très redoutable.

Certains responsables civils sont descendus à terre avec les officiers. Les Européens étaient encore consignés à bord des vaisseaux de guerre où ils s'étaient réfugiés, car la prise de Sfax n'était pas terminée; on continuait à faire sauter les maisons et à en déloger les insurgés.
La ville, entre incendies et démolitions était en ruines littéralement et, de toutes parts, ce ne sont que trous énormes, brèches béantes, produites par les obus de quinze navires tirant sans désemparer.

Un détachement d'artillerie a occupé la batterie rasante, dont les vieux canons, du temps de Louis XVI, ont été encloués par les marins français.
Uniquement au niveau de la tranchée de défense, d'où une forte odeur cadavérique commence à s'échapper, il y a trente-sept corps d'Arabes tués sur les balles d'alfa et qu'on a enterrés, à quelques centimètres, dans la tranchée même.

Les soldats du 93ème de ligne et du 77ème sont campés dans les ruines du quartier européen, qui forme la partie basse de Sfax.

A l’intérieur de la Médina, qui est réduite en miettes par les torpilles, l'aspect général devient plus sombre. On marche sur les étoffes, sur les meubles brisés, sur les registres de comptabilité, sur les ustensiles les plus divers, que les explosions ont violemment projetés avec les décombres ; les soldats sont noirs de poudre; ils montent la garde deux par deux, et de vingt pas en vingt pas, pendant que les officiers et les sous-officiers visitent les maisons avec des pelotons de dix hommes, fouillent les caves, et barricadent ensuite les portes, en écrivant dessus le mot "visité"

En avançant encore dans la ville arabe, le spectacle devient encore plus curieux et plus inattendu : chaque rue est encombrée de moellons et de morceaux de minaret tout entiers; les soldats, pour se reconnaître dans ces dédales, ont donné aux rues les numéros de leurs régiments : rue du 92ème, rue du 77ème.

La Grande Mosquée, qui est fort belle; est occupée par le bataillon du 77ème. Son aspect est singulier avec son étendue, ses voûtes soigneusement blanchies, aux colonnes de marbre, et sur les nattes de laquelle les troupiers ont établi leur domicile.
Des militaires loustics font la soupe habillés en grands prêtres, avec des robes invraisemblables et des calottes de toutes les couleurs.
Le turban vert et le drapeau du prophète servent de ceintures à nombre de cuisiniers. Six cents hommes sont logés là-dedans comme des princes ; aussi est-ce avec douleur qu'ils apprennent de leurs officiers que demain on rendra la mosquée au culte des Sfaxiens qui auront réintégré leurs domiciles, bien démolis au surplus.

Les quatrièmes bataillons des 92, 93, 77, 136 et 137ème de ligne rapporteront en France quelques bibelots provenant de la prise de Sfax ; plus d'un troupier a mis dans son sac un fichu de soie ou des pantoufles brodées pour sa payse ; mais, malheureusement, le sac du soldat est lourd et déjà rempli par les objets nécessaires. Il faudra s'en aller à Gabès par étapes, et alors, adieu les souvenirs de Sfax !

On a ramassé dans la mosquée un Coran très précieux qui appartenait à l’Imam de la mosquée qui a été tué dedans en poussant des cris de mort contre les chrétiens et excitant ses coreligionnaires à la résistance, alors que, déjà, la ville était prise.

Le colonel Jamais, qui commande maintenant la place sous les ordres du général Logerot, et en dehors de l'autorité des amiraux, occupe le premier étage d'une maison restée à peu près intacte.
Il a donné l'ordre de conduire à bord de l’Alma les notables Sfaxiens qui demandent à transiger et à discuter les conditions de la paix. Ces notables qui ont l'air d'être cossus ; l'un d'eux possède douze maisons dans Sfax, disent que les insurgés les ont forcés de se mettre avec eux, ce qui est bien possible, mais ce qui n'est pas absolument certain.
Enfin, aujourd'hui, ils sont venus demander l'Aman, l'éternel aman, et, après avis du Gouverneur Djellouli, réfugié à bord de L'Alma depuis quinze jours, on va le leur accorder.

Il paraît que les Sfaxiens s'étaient préparés à cette guerre des maisons, car c'est ainsi qu'ils nous ont tué du monde. Les pertes que nous avons faites peuvent se décomposer ainsi :
Marins : tués, 13 ; blessés, 26 (transportés à l'ambulance à bord de la Sarthe).
Troupes de ligne : tués, 25 ; blessés, 80.
Total pour les différentes armes : 38 morts et 106 blessés.

Les morts on été enterré solennellement dans le cimetière européen de Sfax. La cérémonie religieuse avait eu lieu à bord de l'Alma; puis une seconde cérémonie avait été célébrée dans la mosquée, par le curé catholique de Sfax, un Maltais.

A propos de la Kasbah, il faut dire que, contrairement à ce qu'on croyait, elle n'était point défendue par une garnison. Lorsque les torpilles en eurent détruit la porte massive, soigneusement fermée, on ne trouva dans l'intérieur qu'un Arabe, qui se mettait en devoir de faire sauter la poudrière. Séance tenante il fut passé par les armes, et un grand malheur put être évité.

Le palais du gouverneur, situé au sommet de la ville arabe, est une petite merveille de décoration orientale. Le commandant Gardarein, du 93ème de ligne ne peut pas se plaindre
De ce quartier général qui lui est échu en partage.

A suivre ...

jeudi 15 novembre 2007

69- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (3ème Partie)

Le canon du Colbert retentit, et l'escadre entière aussitôt répond : une grêle d'acier et de feux, franchit les eaux calmes du golfe et vient éclater sur la ville, réduire en poussières ses maisons, ses coupoles et ses minarets.
Un fracas de détonations, un embrasement du ciel par les obus de 187 kilos, qui saisit d'admiration les officiers et les matelots restés à bord de l'escadre, tandis qu'il inspirait une crainte instinctive aux trois mille hommes de débarquement empilés sur des chalands, et pardessus les têtes de qui passait toute cette mitraille diabolique

La ville de Sfax, pendant ce temps-là, brûlait et sautait, non sans difficulté, car les murs en sont terriblement durs, et plus d'un obus traversait les maisons sans les endommager gravement. Les Arabes appelaient la ville « Sfax la Forte », et non sans raison, car évidemment, si des forces européennes avaient défendu cette place, il eut fallu dix jours et vingt mille hommes pour l'emporter.

Les trois bataillons fusiliers marins de débarquement les plus importantes, celles du Colbert, de l'Alma, et de la Reine-Blanche, étaient commandées par les capitaines de vaisseau qui sont les commandants de ces bâtiments : Mr. Marcq de Saint-Hilaire, Miot et de Marquessac ; des lieutenants de vaisseau, des enseignes et des aspirants complétaient les cadres et conduisaient énergiquement ces 1,600 marins.
Le bataillon de 1,200 hommes d'infanterie commandé par le Colonel Jamais, envoyé de Rouen à Sfax uniquement dans ce but, s'approchait du rivage sur les chalands du transport la "Sarthe". Le Contre-amiral Conrad dirigeait l'ensemble sous les ordres du Vice-amiral Garnault.


Pendant ce temps, les Arabes qui défendaient la ville, au nombre de 3,500 à 4,000, s'enfuyaient dans les jardins inexpugnables de Sfax où ils étaient et sont encore, et les seuls fanatiques, estimés à 1,200, restaient pour se défendre corps à corps aussitôt que leurs batteries rasantes, armés de vieux canons rouillés, seraient aux mains des assaillants.

Les remparts de la Médina étaient durs comme du fer et capables de résister à une grosse artillerie. Les Arabes avaient raison de mettre leur confiance dans ces fortifications incroyables; il faut les avoir vues pour comprendre tout ce que 1,200 Arabes fanatiques ont pu en tirer.

L'Amiral Garnault, placé près du rivage, sur "le Desaix", fait signe de cesser le feu à huit heures, et aussitôt les gros canons et les canonnières se taisent. La ville flambe.
C'était le moment de s'emparer de la batterie rasante et de la Kasbah, situées l'une à droite, l'autre à gauche de la ville, toutes deux au bord de la mer.

Le débarquement s'opère sous une grêle de balles, que les insurgés tirent à vingt mètres. Les officiers de terre et de mer enlèvent alors leurs troupes, et une charge meurtrière commence dans une tranchée, profonde de deux mètres et protégée par de grosses balles d'alfa, où les Arabes se sont embusqués.

La première compagnie du 92ème de ligne, Capitaine Bouringuer, s'empare alors de la tranchée dans un combat corps à corps des plus brillants. Son Lieutenant, Mr. Marchand, et son Sous-Lieutenant, Mr. Dailly, tombent grièvement blessés ; six hommes et bientôt dix-sept sont mis hors de combat, tandis que les Arabes de la tranchées ont perdu trente-sept hommes en un clin d'œil.
Les jeunes soldats du 92ème, qui viennent de la Manouba, sont dignes de leurs aînés, et tout le monde s'attend, à Sfax, à voir la compagnie de la 92ème mise à l'ordre du jour de l'armée.

Pendant que les fantassins accomplissent ce fait d'armes, les marins placés plus à droite sur la plage se ruent comme de véritables tigres sur la batterie rasante, qu'ils escaladent sans faiblir, toujours en perdant du monde et toujours en abattant les Arabes.
Sans hésitation, un Quartier-maître du "Trident" arrive sur le sommet de la redoute et y plante le pavillon de son canot, qu'il avait emporté sans mot dire. Le pavillon est criblé de balles et le quartier-maître tombe raide mort, victime des traditions de la vieille France.
Il est aussitôt remplacé par dix autres que canardent les Arabes du haut de leurs remparts envahis. Cinq cents marins ont tourné la redoute, et la batterie rasante est prise. On fusille un lot d'insurgés qui cherchent à fuir, et les troupes sont maîtresses de la place dans toute sa longueur.

La guerre des rues commence alors : en effet, au premier moment d'effroi, beaucoup d'Arabes se sont réfugiés dans leurs caves et, de là, ils tirent à coups redoublés sur le 136ème, sur le 71ème, sur le 93ème qui, croyant la ville ouverte, s'avançaient rapidement vers le sommet des rues, qui vont toutes en pente vers la mer.
Les soldats, frappés par derrière, commencent à tomber en assez grand nombre. On fouille alors les maisons une à une ; on y fusille tout ce qu'on trouve les armes à la main, et une véritable chasse à l'Arabe commence dans Sfax déserte, pour se continuer trois jours encore.


L'Officier torpilleur de la Reine-Blanche, Mr. Debrem, Lieutenant de vaisseau, dont le concours a été des plus précieux, est chargé de faire sauter avec du fulmi-coton des pâtés de maisons où les Arabes se défendent à outrance. Ce procédé expéditif terrifie ceux qui ne sont pas écrasés, mais ils n'implorent aucun pardon.
La défense de Sfax par les Arabes a été héroïque, autant que le bombardement et l'assaut par nos troupes ont été dignes des plus beaux faits d'armes de l'armée d'Afrique.

Il ne faut pas s'y tromper, la prise de Sfax est un fait de guerre autrement important que tout ce qui s'est passé en Tunisie jusqu'à cette date.

A suivre ...

mercredi 14 novembre 2007

68- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (2ème Partie)

Liste et photos des principaux Navires de Guerre qui ont participé à la Prise de Sfax.

Le Trident (1876)



La Surveillante (1864)



La Reine Blanche (1869)


La Galissonnière (1872)

L'Alma (1869)


l'Intrépide (Ex- Valmy) (1847)


Le Friedland (1876)


Le Colbert (1875)

mardi 13 novembre 2007

67- La Prise de Sfax : un Massacre oublié par l’Histoire (1ère Partie)

Dès la capitulation du pays des Kroumirs, ensuite de Tunis la Capitale de la régence et la signature du traité du Bardo par Sadok Bey qui institua le Protectorat français sur la Régence, Mr Roustan, le Résident Général et avec l’aide de ses Généraux prit les premiers arrangements nécessaires pour compléter la domination de tout le nord de la Régence.


Les quelques résistances s'éteignaient tous les jours; les tribus visitées par l’armée française venaient solliciter l'Aman et remplir les conditions qui leur étaient imposées : désarmement, obligation pour la tribu de reprendre ses campements ou installations habituels ; fourniture de mulets pour le service des transports de l’armée française; provision de 40 francs par tente à verser au Trésor par les tribus contre lesquelles les Algériens, Européens ou indigènes avaient présenté des revendications fondées; engagement à payer, comme contribution de guerre, telle somme que le gouvernement fixerait ultérieurement; livraison des réfugiés, condamnés, contumaces, gens dangereux réclamés par les français et livraison d'otages à titre de garantie pour l'exécution de ces conditions.

Le Général Logerot entreprit aussi de châtier certaines tribus frontalières, ainsi il parti en razzia avec 4 bataillons contre des fractions des Chihia, des Beni-Mazen, les Ouled Ali M'fodda, les M'rassen et les Ouchteta. Il leur imposa des dures conditions, emporta même avec lui des otages et infligea une grande ruine aux Ouchtetas.


La campagne était finie : en quelques semaines, l’armée française à su établir l'ordre dans le pays et sa domination était reconnue par les tribus soumises. L’Armée Française ne devait donc pas s'attendre à être obligés de bientôt reprendre la lutte. C'est cependant ce qui arriva.

Depuis des longs mois des Mokaddem de l'ordre religieux des Senoussia répandus par millions à travers l’Afrique et qui vouent une haine implacable aux chrétiens parcourent
Le sud Tunisien, en prêchant la guerre sainte et annonçant le triomphe prochain des vrais croyants.

De même, surexcité par les fonctionnaires turcs de la Tripolitaine, le Colonel "Amir Liwé" Sidi Ali Ben Khlifa (70 ans) qui est aussi le Caïd de plusieurs localités du centre-ouest refuse le traité du Bardo et se révolté même contre le pouvoir du Bey.

Malgré les tentatives du Bey de rallier l’ensemble des tribus autour de lui par la force ou par la corruption, Ali Ben Khlifa, aidé par son frère Hadj Salah Ben Khlifa, est arrivé à avoir l’allégeance de plusieurs tribus qui se sont adhérés à sa cause, celle de combattre l’envahisseur Français.

En Juin 1881, Ali Ben Khalifa réussi à réunir les chefs des tribus du Sud et du centre Tunisien ainsi que les plus importants Chefs Religieux et les Hommes Influents du pays dans la symbolique mosquée de "Okba Ibn Nefaa" a Kairouan. Officiellement, la Résistance à l’envahisseur Française et à l’autorité Beylicale viennent d’être déclarés.

De même Ali Ben Khlifa se retourne vers le Dey de Tripoli et le Sultan Turc pour leur demander aides et armes qui ne parviendrons jamais aux insurgés.

Sans attendre le secours Turque, le Vieillard et par les propres moyens de sa tribu les Neffets, commence à armer les insurgés et entama une guérilla qui dura 4 ans pendant lesquels il eu une série d'engagements très meurtriers avec les contingents d’Ali-Bey.

Le 25 juin 1881 et avec l’aide des cavaliers de la tribu Mhedhba, Ali Ben Khlifa remporta une victoire écrasante contre un groupe de Soldats du Bey dans la région de Sfax.
Encouragés par cette victoire, beaucoup d'autres cavaliers et guerriers des tribus tunisiennes ont rejoints la Guérilla et le 2 Juillet 1881, Ali-ben-Khalifa fut même nommé Bey avec Sfax comme capitale provisoire.

Lors de la révolte de la ville de Sfax, certains Européens furent massacrés, et les étrangers ainsi que certains notables y inclus le Caïd Local Djellouli durent se réfugier à bord des navires en rade.

Sous les ordres du vice-amiral Garnault, l’escadre de la Méditerranée, avait été chargée d'aller prendre Sfax et le 14 juillet au soir, les cuirassés "le Colbert", vaisseau amiral, "le Trident", "le Marengo", "le Friedland", "la Surveillante", "la Revanche" et "la Reine-Blanche", "la Galissonière" et "l'Alma"; les canonnières "la Pique", "le Chacal", "le Léopard", "l'Hyène" et "le Gladiateur"; les transports "la Sarthe" et "l'Intrépide" sont mouillés devant la villa de Sfax.
Dans les premiers jours de juillet et après échec des négociations avec les arabes, l'escadre française entama le bombardement de la ville pendant tous les jours pour ne s’arrêter que le soir. La nuit, les arabes réparaient et rebâtissaient ce que les obus avaient démoli, mais ils ne pouvaient pas faire ressusciter leurs nombreux morts.

Après un essai infructueux tenté le 8 juillet, le vendredi 15 commence un bombardement lent avec les grosses pièces des gaillards, tandis que les canonnières au-dessus desquelles passent, en deux étages, les obus de l'escadre et de la division du Levant, cherchent à démolir les défenses de la plage et à faire brèche dans la muraille. Cette première opération prépare le débarquement et l'attaque qui sont ordonnés pour le lendemain. Les transports la Sarthe et l'Intrépide fournissent deus canots-tambour ou chalands plats en tôle dans lesquels on installe des canons qui pourront approcher très prés du rivage et contribuer puissamment à protéger le débarquement.


Au point du jour du samedi 16 juillet 1881 et de l'aveu de tous les témoins, un bombardement mémorable, qui a duré à pleine volée pendant deux heures, rappelait les plus effrayants spectacles du genre, y compris la canonnade nocturne de Cherbourg servie par les mêmes cuirassés, il y a juste un an.

A Suivre ...

samedi 10 novembre 2007

Quizz : La Gare du Nord



Ces cartes postales, respectivement de 1880, 1907 et 1908 représentent la fameuse Gare du Nord Tunisienne.

Dans quel endroit de Tunis, était-elle cette Gare située ?

----- SOLUTION -----
Lire aussi le commentaire de Roumi en bas ainsi que l'article paru sur wikipedia : TGM

Photo de la Station du Nord dans l'actuel Passage

jeudi 4 octobre 2007

Le Garbaji : Le Porteur d'Eau

Dans les Médinas de la Régence, rares sont les maisons qui avaient leurs propres fontaines d’eau par contre plusieurs demeures aisées avaient des puits "Bir" et la plupart des logements avaient des citernes souterraines de collecte d’eau de pluie "Majen".
Généralement l’eau de puits était utilisée pour l’usage ménager par contre celle du "Majen" servait aussi bien pour la lessive que pour boire.

Pour combler leur besoin en eau, les familles, contre une rémunération de quelques sous (suivant la quantité d’eau livrée) faisait appel au services du Garbaji qui est le marchand d’eau qui puisait le liquide des fontaines publiques pour les villes et des puits et oueds pour les villages.
L’origine du nom Garbaji est tirée de la Guerba dans laquelle il transportait le précieux liquide.
La Guerba est une outre, généralement en peau de bouc ou de chèvre qui est enduite de l’intérieur avec du "Kotrane" l’huile de Cade extraite des branches du "3ar3ar" le Genévrier.
Le "Kotrane", qui possède des caractéristiques antiseptiques et désinfectantes, donne à l’eau un arrière gout très appréciable tout en diminuant l’imperméabilité de l’outre.

Le monopole des Garbajia dans la Médina de Tunis était tenu par les Djéridia (habitants du Djérid Tunsien) connu pour leur confiance et leur discrétion qui leur permettait d’accéder à l’intérieur des maisons arabes.

Le Garbaji entame sa journée par la livraison de l’eau à ses clients habituels ensuite il faisait sa tournée dans les quartiers pour les clients occasionnels. L’après-midi, après avoir ajouté quelques morceaux de fenouils à la Guerba pour donner à l’eau une saveur anisée, le Garbaji parcourait les Souks pour rafraichir les passants qui ont soif « Barred yé Atchane » « Rafraichissement, Ô toi l’assoifé ».

En ce qui concerne les villages, l'eau est généralement transportée en grande quantités, dans des jarres ou même des outres sur le dos des ânes.
Guarbaji, Guerbaji, garbadji, garbagi, garbaji
Remarquez la Khomsa peinte sur les piliers de la porte de la maison qui parait être celle d'une famille juive.

mercredi 26 septembre 2007

Quizz : Devinez l'Endroit ?

Non, ce n'est pas une photo d'une ville européenne, c'est Tunis entre 1900/1910.
Sauriez-vous connaitre l'endroit et surtout deviner la fonction du bâtiment en face avec le drapeau de la France.

jeudi 20 septembre 2007

Le Canal de La Goulette